Chanut, Danielle Marie - Plasticienne

Elle crée des sculptures surréalistes et baroques, association inhabituelle de livres et d’objets métamorphosés leur procurant une dimension imaginaire et symbolique. Une œuvre singulière.

Nos chemins s’étaient croisés il y a près de vingt ans, à Noyers, petite cité médiévale de l’Yonne. Danielle Marie Chanut était antiquaire et fabriquait déjà d’étonnants objets rococo et poétiques et des masques en plumes. Cette passionnée de théâtre avait l’art de les mettre en scène et de raconter des histoires autour de chacun. Je l’ai retrouvée rue Mazarine à Paris, attirée en passant devant sa boutique de livres anciens par de curieuses sculptures baroques exposées en vitrine. Elles étaient à la fois livre, animal, végétal, conte et légende, poésie. « Les livres détournés » de Danielle Marie Chanut furent d’abord des livres anciens, cartonnés ou reliés, imprimés de lettres et d’images, qui avec le temps se sont abîmés, fragmentés. Sous les mains de cette artiste sensible à l’imaginaire, à la poésie et d’une créativité alimentée par la littérature et le surréalisme, le livre est devenu œuvre d’art. « J’essaie de raconter des histoires avec un langage autre que les mots, avec des matières : sable, racines, os, clous, perles anciennes, bois flotté, coquillages, pinces de crabe, bec d’oiseaux, qui déclenchent directement l’émotion (la mienne en particulier), langage universel. »

Son atelier de la Villa de l’Astrolabe, près de Montparnasse ressemble à un antre de fée ou de sorcière envahi par des êtres hybrides, des filtres magiques, des objets hétéroclites amoncelés depuis des années en attente d’être métamorphosés en : « Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie » ; « Ne cherchez pas mon cœur les bêtes l’ont mangé » ; « Je suis le chat qui s’en va tout seul et tous les lieux se valent pour moi » … Souvent, il n’y a aucun lien signifiant entre le livre matière première et l’œuvre qu’il a générée. Le nom de celle-ci germe alors au fil du long processus de création et des sources d’inspiration, le plus souvent littéraires et devient un clin d’œil à Ronsard, Baudelaire, Kipling, Rabelais, Goethe, etc. Des références cachées entre les pages, et à picorer sans fin. Danielle Marie Chanut, qui expose régulièrement, a créé près de 113 « livres-détournés » et ses œuvres sont dans des collections privées en France, en Suisse, en Belgique et aux États-Unis.
Parallèlement, elle poursuit son activité de factrice de masques et de créatrice de costumes de théâtre en plumes. Prochaine commande pour « Le rêve d’Alice », spectacle qui sera donné en mai 2009, au Théâtre de la Ville, par les élèves du Conservatoire National Supérieur de Danse (CRR Paris) et dont Olivier Chanut, son fils, signe l’adaptation et la chorégraphie.

Catherine Rigollet (Décembre 2008)

Photographies D.M. Chanut et D.R