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Sarkis et Eugène Leroy. « Intérieurs »

La confrontation peut surprendre. Sarkis (né en 1938 à Istanbul, turc d’origine arménienne, installé à Paris) et ses installations d’art contemporain composées d’objets, de sculptures, d’aquarelles (il est l’« inventeur » de l’aquarelle dans l’eau), de vitraux, de néons, de photographies et de films, tous créés par l’artiste, tous nourris de références à l’histoire, la philosophie, les religions, les arts ou la géopolitique et tous liés par des passerelles formelles ou temporelles. Et le peintre, dessinateur et graveur Eugène Leroy (1910-2000, né à Tourcoing.), qui, à l’écart des modes, a puisé dans l’art classique et l’œuvre de Rembrandt son inspiration pour peindre des « paysages » et des « figures », avec des empâtements puissants, une richesse chromatique intense et une quête incessante de lumière.

Conçue par Sarkis lui-même, qui déplore que Leroy ne soit pas encore reconnu comme l’une des figures artistiques les plus importantes du XXe siècle, l’exposition à la galerie Nathalie Obadia confronte les deux œuvres pour en montrer les rapprochements, évidents aux yeux de Sarkis, mais qui nécessitent un peu d’attention pour le visiteur, tant les deux œuvres paraissent à priori étrangères l’une à l’autre.

On y perçoit alors la notion d’accumulation (de matière chez Leroy, d’objets qui font sens chez Sarkis), de rapport à la peinture (Leroy peint, Sarkis transforme l’acte de peindre en objet comme dans ses aquarelles dans l’eau), les héritages (notamment Rembrandt pour Leroy, Munch pour Sarkis dont le Cri décida de sa vocation d’artiste), mais aussi la façon de façonner chaque œuvre sans notion de durée déterminée, la perception de la lumière, le sens universel de leur œuvre, leur humanisme.

Un dialogue passionnant, dans un accrochage original, y compris dans l’éclairage, et qui fait voir les œuvres autrement, de manière inédite. Tel cet extrait de film Pour Eugène Leroy, 2017 (voir visuel ci-contre), dans lequel Sarkis réalise une aquarelle dans l’eau, diffusant les couleurs dans un bol posé sur une toile de Leroy, dans une belle alchimie.
Ou encore ces trois toiles de Leroy présentées sur une immense photographie de son atelier, comme deux formes d’un même paysage mental, deux « intérieurs » en quelque sorte. L’ensemble d’une quarantaine d’œuvres des deux artistes a aussi été « pensé comme un intérieur », avec un banc, des étagères... et des verres d’eau disposés dans chaque pièce ; un clin d’œil à la peinture car tous ces verres sont accompagnés d’une petite peinture rouge sur papier.

Catherine Rigollet

Visuels : vues de l’exposition « Intérieurs », curated by Sarkis avec des œuvres de Eugène Leroy et Sarkis, Galerie Nathalie Obadia, Paris. Photos L’Agora des Arts.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 12 janvier au 17 mars 2018
Galerie Nathalie Obadia
Cloître Saint-Merri
Du mardi au samedi, 11h-19h
Tél. 01 42 74 67 68
Entrée libre
www.nathalieobadia.com