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La folie en tête : aux racines de l’art brut

La folie, étrangement absente de l’œuvre de Victor Hugo, est dramatiquement présente dans sa vie familiale, avec Eugène, son frère, et Adèle, sa fille, qui tous deux mourront internés. Au cours du XIXe siècle, la psychiatrie a porté une attention de plus en plus grande à la parole du malade puis à ses « productions » plastiques.
Après l’Entrée des médiums – spiritisme et art de Hugo à Breton, en 2012, la Maison Victor Hugo poursuit l’exploration de ce territoire de l’art.

Clandestines, fragiles, faites sur les murs de l’asile ou sur des matériaux de hasard, récupérés, les œuvres des internés ont peu à peu retenu l’attention des psychiatres qui en furent les premiers collectionneurs, les premiers « critiques » de cet « art des fous ». Cet art brut que Dubuffet, son « inventeur », n’associait pas strictement à l’art des aliénés, mais élargissait aux travaux d’art réalisés par des personnes autodidactes et étrangères aux milieux artistiques, excluant en revanche de l’art brut : l’art primitif, l’art populaire, l’art naïf et l’art enfantin.

Privilégiant, non pas l’imagerie de la folie, mais les productions des fous et les œuvres les plus anciennes, l’exposition questionne les ressorts de la création artistique. Le parcours est organisé de façon chronologique, à travers près de 200 œuvres issues de quatre grandes collections européennes constituées au cours du XIXe siècle par 4 psychiatres qui ont récupéré souvent en cachette, les œuvres des internés, suscitées parfois à des fins « d’art-thérapie ».

Parmi tous ces « artistes », certains sont désormais des figures tutélaires, tel Adolf Wölfi (1864-1930), le patient le plus célèbre du Dr Walter Morgenthaler (1882-1965) qui dirigea l’asile de la Waldau près de Berne de 1913 à 1920. Wölfli y fut interné à l’âge de 31 ans pour attentat à la pudeur. Durant trente ans, jusqu’à sa mort, il se voua du matin au soir à l’expression artistique, désormais son unique issue. Son œuvre immense compte 25 000 pages couvertes de compositions graphiques denses et colorées, enrichies de partitions musicales.

Refusant la mise en spectacle des troubles mentaux, l’exposition est exclusivement un hommage aux artistes, et à leurs thérapeutes.

Catherine Rigollet

 À voir aussi jusqu’au 28 février, « Entre Art des fous et Art brut, la collection Sainte-Anne », au musée d’art et d’histoire de l’hôpital Sainte-Anne.

Visuels : August Klett (1866-1928), « Zuckerfabrik Heilbronn a/N » (détail), crayon, aquarelle sur papier à dessin, 1919, inv. N° 564. Prinzhorn Collection, University Hospital, Heidelberg © Prinzhorn Collection, University Hospital, Heidelberg.
Adolf Wölfli, mine de plomb et crayon de couleur sur papier (Collection Morgenthaler) © ABCD, Montreuil.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 16 novembre 2017 au 18 mars 2018
Maison Victor Hugo
6, place des Vosges – 75004
Du mardi au dimanche
De 10h à 18h
Tarif plein : 8€
Tel. 01 42 72 10 16
www.maisonsvictorhugo.paris.fr