Après l’artiste néerlandais Krijn de Koning en 2010, c’est au tour du duo Andy Cao (qui vit à Los Angeles) et Xavier Perrot (qui vit à Paris) d’investir la Maladrerie Saint Lazare à Beauvais. S’inspirant de l’histoire et de la symbolique de cette belle architecture hospitalière qui accueillit une léproserie aux XIIe et XIIIe siècles, le studio Cao/Perrot a conçu Red Bowl (Bol rouge), un grand bosquet de tiges métalliques surmontées de billes de verre rouge bougeant et sifflant selon le vent et émergeant d’une prolifération de lentilles d’eau flottant sur la mare. Poursuivant leur rencontre avec le patrimoine beauvaisien, les deux jeunes plasticiens du paysage ont aussi habité la ruine de la collégiale Saint-Barthélemy d’un dôme blanc, monumentale coupole de lumière composée de 3000 cristaux fournis par Swarosvski Eléments (à voir de préférence quand ils scintillent au soleil).
Pour Beauvais, qui fête l’obtention du label Ville d’art et d’histoire, cette valorisation du patrimoine à travers la création contemporaine s’accompagne durant tout l’été d’une mise en lumière de son exceptionnelle cathédrale Saint-Pierre (à l’histoire chaotique, à la nef jamais terminée et aux voûtes culminant à 48 mètres !). Pour ce flamboyant édifice gothique, on peut regretter que le groupe Skertzó ait à ce point manqué d’inspiration et nous offre un spectacle sans rythme, pâle resucée de celui de Reims. On se rattrapera avec une visite à la galerie nationale de la tapisserie qui expose une vingtaine de trésors de la cathédrale (rarement présentés) dont La Vie de saint Pierre, tissage datant du XVe siècle et quatre pièces de l’Histoire d’Alexandre le Grand (d’après Charles Le Brun), une tenture réalisée à la Manufacture de Beauvais vers 1694. Fondée en 1664 par Colbert, elle est aujourd’hui installée dans d’anciens abattoirs ; une dizaine d’ateliers y tissent toujours, sur commandes de l’État, des tapisseries (notamment modernes et contemporaines) en basse lisse - les Gobelins travaillant en haute lisse. Un lieu passionnant à découvrir.
Catherine Rigollet