Léonard de Vinci au Clos Lucé. Les dernières années du génie polymathe

La légende rapporte que François Ier, roi de France, ami et mécène de Léonard de Vinci qu’il nommait « mon père » se trouvait à ses côtés lorsque le génie polymathe trépassa au Château du Clos Lucé, le 2 mai 1519, à 67 ans. C’est ce que suggère aussi un petit tableau de Jean-Auguste-Dominique Ingres intitulé Les derniers soupirs de Léonard de Vinci, une peinture conservée au musée du Petit Palais à Paris et dont une copie est accrochée dans la chambre de cette belle demeure que l’artiste italien, nommé « premier peintre ingénieur et architecte du roi, mais aussi maître des divertissements », occupa à Amboise lors de son séjour français. Les trois dernières années de sa vie.

Appelé en 1506 par le gouverneur français de Milan, Charles d’Amboise, Vinci se passionne pour les sciences. Il dessine à peu près tout ce qu’il voit, croise et rencontre : humains, animaux, plantes, mécanismes.... Dès 1507, il s’investit dans un projet de fastueuse villa commandée par Charles II d’Amboise. Il imagine des moulins pouvant produire du vent à tout moment ou actionner des instruments de musique, des canaux pour tenir le vin au frais et assurer l’irrigation des orangers et des cèdres, des jets d’eau pour surprendre les passants ou encore un fin réseau de branches tendu au-dessus du jardin pour retenir des oiseaux. Ce palais conjuguant architecture et art ne verra jamais le jour. En 1515, la bataille de Marignan donne le pays milanais à François Ier, qui convie Léonard en France. L’année suivante, l’artiste quitte Rome et son service auprès des Médicis et débarque au Manoir du Cloux, (actuel Château du Clos Lucé à Amboise), après un périple à dos de mulet à travers les Alpes, accompagné de son disciple favori, Francesco Melzi. Il a emporté avec lui trois peintures : la Joconde, Saint Jean-Baptiste, La Vierge à l’enfant avec sainte Anne, ainsi que ses carnets, croquis, dessins, et manuscrits plus tard rassemblés dans les codex, aujourd’hui dispersés dans le monde. Car si Léonard de Vinci n’a peint qu’une quinzaine de tableaux dont cinq sont au Louvre, il a réalisé 100 000 dessins et croquis et 8000 feuillets de manuscrits.

Arrivé en France, l’ingénieux Léonard s’est vite attelé aux plans d’une cité idéale commandée par François 1er qui veut éblouir son grand rival Charles Quint. Autour du palais, le cerveau bouillonnant d’idées imagine des écuries sophistiquées, un nouveau quartier de résidence pour la cour et une véritable ville neuve autour d’un complexe réseau de canaux, l’inscrivant dans une perspective de capitale pour le royaume. Las, à ce projet prévu à Romorantin (une nouvelle Rome ?) et abandonné en 1518 a succédé immédiatement celui de Chambord. Léonard de Vinci y conçoit son fameux escalier à double révolution devenant l’axe d’un château où l’on peut se croiser sans se rencontrer. L’« apothéose » de Léonard, pour reprendre une expression du Professeur Carlo Pedretti, a donc lieu en France, loin de Rome et de Florence.

C’est tout l’intérêt du Clos Lucé de rappeler le lien exceptionnel de Léonard de Vinci avec la France, porté par trois rois, Charles VIII, Louis XII et surtout François Ier. On y découvre tous les talents de ce fils naturel d’un notaire et d’une simple paysanne né à Vinci en Toscane le 15 avril 1452 : dessinateur, peintre, architecte, urbaniste, humaniste, scientifique capable d’inventer des machines volantes, des travaux hydrographiques ou des spectacles de son et lumière…Comme cette grande fête du Paradis que Léonard offrit à François 1er, le 19 juin 1518.

Ouverte à l’été 2021, l’exposition permanente sur l’architecture (au 1er étage des Galeries Léonard de Vinci nouvellement construites dans le parc) évoque avec didactisme ses talents d’urbaniste et de constructeur, dans tous les domaines : civils, militaires, religieux. La promenade dans les pas de Vinci se poursuit à travers les sept hectares du parc où ont été reproduites une vingtaine de maquettes mobiles géantes, machines et inventions techniques (char d’assaut, pont tournant, hélice volante, bateau à aubes...) nées du cerveau inventif de ce génial curieux. N’y cherchez pas sa tombe. Léonard de Vinci repose dans la chapelle du château d’Amboise. Mais comme pour la présence de François 1er lors de sa mort, rien n’assure que ce soit vrai. Aucune analyse ADN n’a encore prouvé que les ossements retrouvés lors d’une fouille soient les siens...

Catherine Rigollet (août 2021)

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Château du Clos Lucé
Demeure de Léonard de Vinci
2 rue du Clos Lucé - 37 400 Amboise
Ouvert tous les jours
Tarif plein : 17,50€ en haute saison
14,50€ en basse saison
Tél. 33 (0) 2 47 57 00 73
https://www.vinci-closluce.com/fr


Visuels :

 Vue du Clos Lucé © Léonard de Serres.

 Chambre de Léonard au château © C.R.

 Atelier de Léonard © Léonard de Serres. Galerie d’architecture Photo Eric Sander .