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Les Impressionnistes à Londres. Artistes français en exil, 1870-1904

Ne vous leurrez pas ! Ceci n’est pas une autre exposition Impressionniste, mais un voyage fort bien documenté aux côtés des artistes qui, de Carpeaux à Derain, pour des raisons politiques mâtinées de besoin de vendre, décident de quitter la France après 1870. Le pays est déstabilisé par la guerre franco-allemande et par la Commune, et l’Angleterre victorienne apparait stable et prospère. De surcroît, le marchand d’art Paul Durand-Ruel vient s’y installer.

Si Monet et Pissarro arrivent à Londres en 1870, ils y restent moins d’une année, faute de ventes. Daubigny et Carpeaux y trouvent également refuge. Le premier obtient un certain succès grâce à Durand-Ruel, d’abord intéressé par les peintres de Barbizon mais qui s’ouvrira aussi aux futurs impressionnistes. Carpeaux parvient à vendre des marbres (bustes du mécène H.J. Turner et de son épouse) mais y passe finalement peu de temps avant sa mort en 1874. En revanche, James Tissot (1836-1902) vit plus de dix ans en Angleterre. Fin observateur de la haute société, il la peint dans ses salons (Trop tôt, 1873) ou dans l’environnement industrialisé de cette fin de 19e siècle ; il sait s’adapter au marché anglais et fait sa propre promotion par le biais de la gravure. Le peintre Alphonse Legros (1837-1911), accueilli à bras ouverts par les Préraphaélites, se crée un cercle de collectionneurs et Jules Dalou (1838-1902) fuyant la répression des Communards, flatte le goût de ses commanditaires avec ses modelages de scènes du quotidien (Paysanne française allaitant,1873).
Trois exquis “nocturnes” de la Tamise de Whistler frôlant l’abstraction (Nocturne en bleu et argent, Chelsea, 1871) amènent aux salles plus précisément impressionnistes.
Les séjours en Angleterre de ces artistes renforcent leur goût pour le travail sur le motif, et le brouillard sur la Tamise leur est un vrai défi pictural. Pissarro y trouve un succès qui sera confirmé par la rétrospective de Paris en 1892 mais Sisley a du mal à trouver son public. Monet revient en 1899, se livrant à des gammes délicates sur la lumière changeante qui baigne la Tamise et le Parlement (Le Parlement de Londres, effet de soleil dans le brouillard, 1904). Sa série des Vues sur la Tamise sera exposée à Paris par Durand-Ruel en 1904. Pour ne pas être en reste, Ambroise Vollard envoie André Derain outre-Manche en 1906 : le peintre ne se limite pas aux motifs brouillardeux de Monet et revient à Paris avec quelque 30 toiles d’un Londres vivement coloré (Big Ben, 1906-1907). La ville, refuge des artistes français dans les années 1870, est devenue, dans la première décennie du 20e siècle, une véritable source d’inspiration.
Une belle balade en territoire londonien à quelques pas des Champs Elysées.

Elisabeth Hopkins

Visuels : Claude Monet, Hyde Park, 1871. Huile sur toile. Museum of Art, Rhode Island School of design, Providence, don de Mrs Murray S. Danforth. Photographie par Erik Gould. Courtesy of Museum of Art, Rhode Island School of design, Providence.
Alfred Sisley, Le Barrage de Molesey, Hampton Court, effet du matin, 1874. Huile sur toile. Scottish National Gallery, Edimbourg.
Claude Monet, Le Parlement de Londres, vers 1900-1901. Huile sur toile, The Art Institute, Chicago. Mr and Mrs Martin A. Ryerson Collection. Photo © The Art Institute of Chicago.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 21 juin au 14 octobre 2018
Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Avenue Winston-Churchill, Paris 8e
Ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h
Fermé les lundis et le 14 juillet
www.petitpalais.paris.fr