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Martine Martine, expression d’être

Si son milieu pouvait prédestiner Martine Martine à l’art, rien en revanche ne pouvait laisser préjuger de la gravité et de l’expressivité de ses grands dessins et sculptures. Dans sa ville natale de Troyes, une très belle rétrospective rend hommage à cette artiste de 80 ans qui continue aujourd’hui à créer avec la même intensité, et dans un surprenant huis clos qui la rend inconnue d’un large public. La découverte est d’autant plus passionnante.

Fille de Pierre et Denise Lévy, dont l’exceptionnelle collection de 2000 œuvres a donné naissance au musée d’art moderne de Troyes en 1982, l’artiste Martine Martine y est née en 1932. D’une grande modestie, avec la volonté de se faire un nom dans l’art, elle a attendu d’avoir 60 ans pour révéler son patronyme et le nom de son époux, l’industriel Léon Cligman, se cachant sous un drôle de pseudonyme. Sa famille est pourtant à l’origine de sa vocation. C’est en effet dès son enfance, dans la propriété de Bréviandes, près de Troyes, qui abrite la passion de ses parents collectionneurs qu’a germé son goût pour la peinture. Son père Pierre dessine, sa mère Denise pratique l’art textile, André Derain et le peintre et verrier Maurice Marinot font partie des amis intimes de la famille ; ils encourageront Martine à partir à 17 ans se former à l’Académie Julian et à la Grande Chaumière, à Paris. Touche à tout, elle crée des bijoux, s’essaye à la céramique, mais c’est surtout en dessin et peinture qu’elle va affirmer son talent « dans une recherche qui allie la puissance des formes et la dynamique du geste », souligne Olivier Le Bihan, conservateur du musée d’art moderne de Troyes.
Vous dessinez comme un sculpteur lui fait-on un jour remarquer. Martine Martine va se mettre à sculpter, sans jamais plus dissocier les deux disciplines. « Pour la plupart des peintres, le dessin est un point de départ. Pour moi, c’est la sculpture » explique-t-elle. Ses œuvres massives, jamais lisses, gardent l’empreinte du pétrissage. Elles sont parfois proches de la caricature comme ses séries de chevaux ou ces têtes de Balzac, deux thèmes récurrents de son travail avec les mains et les sumos. Des sujets qu’elle explore de manière sérielle, obsessionnelle et instinctive, « avec les tripes, jamais avec la tête », confie-t-elle. Si les peintures de Martine Martine, qui doit à Katia Granoff sa première exposition personnelle en 1971, côtoient le fauvisme, tous ses dessins sont d’une grande sobriété de couleur, réalisés dans de sombre lavis où domine le noir et blanc. Mais qu’il s’agisse de petits ou de grands formats, c’est toujours la dynamique du trait qui frappe et la trame complexe des hachures qui composent ses œuvres d’un « expressionnisme nouveau » lâche tout sourire cette femme étonnamment frêle face à la puissance et à la virilité de ses œuvres.

Déjà représentée dans les collections du musée d’Art moderne par plusieurs peintures et sculptures monumentales, Martine Martine n’a cependant jamais fait l’objet d’une exposition particulière à Troyes. Celle-ci réunit une sélection de 30 grands formats, essentiellement des lavis, associés à une trentaine de sculptures (bronzes, plâtres) et un ensemble de céramiques et de bijoux.

Catherine Rigollet

Visuel : Portrait de Martine Martine dans son atelier © Bertrand Michau
Et Balzac 1, Bronze. 55 X 40 X 35 cm ‐ 2006. Martine Martine ‐ © Laurent Lecat
Visuel page d’accueil : Balzac Paysage, Huile sur toile, 162 X 130 cm ‐ 2011. Martine Martine ‐ © Bertrand Michau

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Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Martine Martine. Expression d’être
Du 13 avril au 25 août 2013
Musée d’art moderne
14, place Saint-Pierre - 10000 Troyes
Tous les jours, sauf lundi
Entrée : 5€ (avec entrée musée)
Tél. 03 25 76 26 80
www.musees-troyes.com

 

 A voir aussi au musée de Troyes :
Les oeuvres de la céramiste Ursula Morley Price. L’exposition réunit une sélection de près de 80 pièces uniques réalisées par l’artiste entre 1963 et 2013. Du 22 juin au 27 octobre 2013.