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Mircea Cantor : chasseur d’images (Vânătorul de imagini)

Terrien, ainsi se définit Mircea Cantor, artiste de renommée internationale et figure majeure de l’art contemporain roumain. Peut-être à cause de la globalisation du monde dont il observe les réalités sociales et les différentes cultures. Sans doute aussi parce qu’il tente de donner à ses vidéos, dessins et installations une valeur universelle. Son enfance passée en Roumanie, pays de régime communiste lorsqu’il nait en 1977, et ses souvenirs personnels constituent le point de départ de la plupart des œuvres de Cantor, lauréat du prestigieux Prix Marcel Duchamp en 2011.
Invité du musée de la Chasse et de la Nature dans le cadre de la Saison France-Roumanie, l’artiste qui « vit et travaille sur Terre » (si on zoom sur le globe : entre Paris et Cluj), y a développé trois thèmes : le chasseur, « ce métier dans l’ADN humain », l’animal, et le territoire, comme espace à la fois naturel et socialisé.

Trois thèmes porteurs de rivalités et de conflits, mais aussi d’espoir et de poésie. Ainsi ce mur de verre (Breath Separator, 2017) sur lequel Mircea Cantor a dessiné des motifs de fil de fer barbelé, mais dont la transparence permet de se voir, et peut-être de communiquer de part et d’autre. Ou encore ce loup et cette biche qui, réunis dans une pièce vide et blanche, s’observent dans un jeu de tension palpable, mais sans agressivité ; une vidéo muette qui n’est pas sans évoquer la performance I like America and America likes Me (1974), au cours de laquelle Joseph Beuys s’était enfermé dans la Galerie René Block (New York), avec un coyote. Dans une autre vidéo, Aquila non capit muscas (2018), l’artiste a filmé un aigle capturant un drone ; une réponse de la nature au désir de puissance de l’homme contemporain.

La faune est abondante et diversifiée en Roumanie, des forêts des Carpates aux terres marécageuses du delta du Danube. Y vivent ours et loups qui ont suscité la création de légendes, de rites païens, de figures de carnaval et de fêtes comme La Fête de l’ours, le 21 février ou les colinde célébrant la fin de l’année. En lien avec les collections du musée de la Chasse et de la Nature, Cantor a disséminé au fil des salles, parmi les peintures de Chardin, de Oudry et des trophées de chasse, des objets d’arts populaires de son pays. Un patrimoine en danger faute de moyens financiers, explique-t-il. Comme ces grands masques-costumes en forme de « chèvre » servant aux parades et ces masques en cuir, fourrure de mouton et de chèvre, crin et haricots blancs. Des masques imitant une tête d’ours, de renard, mais aussi de « marchand radin », de « cocu », de « patron de bistrot » ou de « charlatan », exceptionnellement sortis des collections du Musée du Paysan roumain. Mircea Cantor s’en est inspiré pour ses dessins qui leur font face, exposés sur des murs peints au vin par l’artiste. Référence à la terre et au terroir depuis l’Antiquité et lien entre les hommes.

Catherine Rigollet

 21 février 2019 : 3e édition de la « Fête de l’ours » au Musée de la Chasse et de la Nature (parades et performances avec la troupe de performeurs de Comanesti, ville de Moldavie.)

Visuels : Sélection de masques issus des collections du Musée du Paysan roumain.
Mircea Cantor, Masks, encre sur papier, 2018, série de 30 dessins, 29,7 x 42 cm chaque. © Mircea Cantor. Photo L’Agora des Arts.
Visuel page d’accueil : Mircea Cantor, Aquila non capit muscas (« The eagle doesn’t hunt flies »), 3min 40 sec, color, HD video – Courtesy the artist and VNH Gallery, Paris.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 15 janvier au 31 mars 2019
Musée de la Chasse et de la Nature
62, rue des Archives 75003
Tous les jours, sauf lundi et jours fériés
De 11h à 18h
Nocturne le mercredi jusqu’à 21h30
Plein tarif : 8€
www.chassenature.org