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Monochrome : Painting in Black and White

Oxymore ? Jeu de mots stimulant ? La sémantique du titre laisse songeur, mais l’exposition intéresse, même si la seule œuvre vraiment monochrome est une installation lumineuse solaire monopolisant la dernière salle : Room for one colour, 1997, d’Olafur Eliasson. La seule pièce où vous êtes autorisé à prendre des photos…
Le reste de l’exposition joue en effet sur les oppositions blanc/noir, lumière/ombre, sur les grisailles. De Van Eyck à Marlene Dumas, les artistes jouent la gamme du blanc au noir, soit de façon brute (Carré noir, 1929 de Malevitch), soit dans les nuances (Annette seated, 1957 de Giacometti), soit dans l’expérimentation des formes, des textures et des symboles, pour éventuellement imiter d’autres médias, tels que sculpture ou trompe l’œil.

Sept salles, chronologiques, déclinent sept thématiques. On y voit de la grisaille dévotionnelle, en peinture ou dans les vitraux, qui prévient contre les distractions que la couleur pourrait offrir au dévot mais aussi de la grisaille comme œuvre d’art indépendante, sans but d’esquisse, pour mettre en valeur le talent de l’artiste. On découvre des études d’ombre et de lumière, telle que Drapery Study, c. 1477 de Ghirlandaio, sujet banal traité avec virtuosité ; des monochromes qui imitent, avec succès, la sculpture (Jupiter and Ganymede, 1739 de Jacob de Wit) ou la gravure, si bien qu’il est difficile de distinguer une gravure d’un dessin à la main sur toile.

Avec la photo, de presse en particulier, les peintres doivent relever les défis de netteté et d’objectivité de ce medium. Le flou qu’utilise Gerhard Richter, le gris qu’il qualifie de « meilleure couleur pour rester dans l’indifférence » pour Helga Matura et son fiancé, 1966 font de sa toile une image retouchée qui perd sa force de témoignage, tout en acquérant une valeur esthétique. Pour la petite histoire, Helga Matura était une demi-mondaine qui fut assassinée par un inconnu en 1966.

La fin du parcours est consacrée à l’abstraction, qui permet tous les effets de monochrome possibles. On remarque les absences de Klein, Soulages, Bonalumi, Fontana et tant d’autres. Place aux binômes de couleurs : Cy Twombly déroule ses graffiti sur fonds anthracite, Bridget Riley ses vibrations en noir et blanc, et Ellsworth Kelly une géométrie noire et blanche impartiale. Si Malevitch fut révolutionnaire en 1929, ses abstractions ne bouleversent plus personne. Reconnaissons qu’elles ont leur place dans l’exposition.

Elisabeth Hopkins

Visuels : Jacob de Wit, Jupiter and Ganymede, 1739. Oil on canvas, 36.9 × 55.5 cm. © Ferens Art Gallery, Hull Museums.
Olafur Eliasson, Room for one colour, 1997. Installation view at ModernaMuseet, Stockholm 2015. Courtesy of the artist ; Tanya Bonakdar Gallery, New York ; neugerriemschneider, Berlin © OlafurEliasson. Photo : Anders Sune Berg.
Visuel vignette : Kazimir Malevich, Black Square, 1929, Oil on canvas, 80 x 80 cm. © The State Tretyakov Gallery, Moscow.

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 30 octobre 2017 au 18 février 2018
The National Gallery
Trafalgar Square
London WC2N 5DN
Ouvert tous les jours de 10 heures à 18 heures
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h
Fermé le 1er janvier 2018
Entrée : £14 du lundi au vendredi,
£16 samedi et dimanche
Réduction de £2 avec achat sur internet
www.nationalgallery.co.uk