MusVerre

Sars-Poteries, un nom trompeur. Car il n’est guère question de poterie, mais de verre dans ce gros bourg du bocage de l’Avesnois (Nord) qui abrita un grand nombre de verreries, particulièrement actives de 1801 à 1937. Pour transmettre la mémoire de cette activité, un premier musée est créé en 1969 sous l’impulsion du curé du village, Louis Mériaux. Devenu trop exigu pour accueillir la collection d’oeuvres anciennes et contemporaines et les résidences d’artistes contemporains, il est remplacé en 2016 par un nouveau bâtiment.

Conçu par le cabinet d’architecture W-Architectures, ce MusVerre qui semble taillé dans la pierre bleue du Hainaut, évoque les grandes heures de la production du verre creux dans la région (bouteilles, flacons, bocaux, verres…). On y découvre ces curieux « bousillés », objets en verre (drageoirs, pipes, objets de dévotion, boules de rampe d’escalier, animaux décoratifs…) que les ouvriers fabriquaient pour eux-mêmes durant leur temps de pause. Ainsi que les traditionnels épis de faîtage qui ornaient les parties saillantes des charpentes des maisons, et que le musée fabrique encore aujourd’hui pour perpétuer la tradition.

Particulièrement spectaculaire par sa diversité et la monumentalité de certaines de ses œuvres, la collection contemporaine bénéficie d’une vaste salle au rez-de-chaussée, largement ouverte sur la nature, et d’une scénographie épurée, baignée de lumière. Depuis les années 1980, les artistes, notamment dans l’Est européen, ont détourné le verre de l’industrie et de son caractère utilitaire, exploitant ses propriétés pour créer des œuvres de plus en plus surprenantes. Elles témoignent de l’immense technicité et de la créativité des artistes, révèlent la diversité de leurs thèmes d’inspiration (nature, intime, société...), et se jouent parfois des sens du visiteur.

Ce dernier pourra en juger devant la robe spectrale de l’américaine Karen Lamonte, qui garde en elle l’empreinte d’un corps (Seated Dress Impression with Drapery, 2007). Le tricot jaune de la canadienne Carol Milne (Continuous, 2013). La table d’un somptueux « bleu Klein » de l’espagnol Joan Crous (Cenoe 9, 2008) qui a fossilisé les restes d’un vrai repas avec sa technique qu’il appelle « embocall ». Le kiwi juteux (2008) du tchèque Jaroslav Matous. L’Écoute (1997) de l’allemand Udo Zembok (https://lagoradesarts.fr/-Udo-Zembok-Open-space-.html), symbolisant la tendre écoute entre deux personnages. Ou encore les tableaux de l’allemande Josepha Gasch-Muche, constitués de milliers de bouts de verre cassé dont l’assemblage conserve tout son mystère, ne révélant que l’effet à la fois tranchant et duveteux. Une collection permanente exceptionnelle, régulièrement renouvelée grâce aux quelque 850 pièces en réserve et enrichie, comme en 2022 avec l’impressionnante œuvre de Jeremy Maxwell Wintrebert, une installation de 220 cives (disques) en verre bleu soufflé à la bouche et à main levée enfilées sur une barre en acier de 7,50m et présentée suspendue par sept câbles (Gravity Ripples Terminal G120, 2022).
Un musée qui mérite un voyage en plein cœur du Parc naturel régional de l’Avesnois. La « Petite Suisse du Nord » dit-on.

Catherine Rigollet (reportage avril 2018 / et février 2023)

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

MusVerre
76, rue du Général-de-Gaulle
59216 Sars-Poteries
Tous les jours, sauf le lundi, de 11h à 18h
Tarif plein : 6€
https://musverre.fr/


Visuels :
 Vue extérieure du MusVerre. A. Vanlatum.
 Epis de faîtage contemporains.
 Karen LaMonte, Seated Dress Impression with Drapery, 2007.
 Jaroslav Matous, Kiwi, 2008
 Carole Milne, Continuous, 2013
Photos des œuvres © L’Agora des Arts.