Vous consultez une archive !

Panorama 20 : le rendez-vous annuel de la création au Fresnoy

Chaque année, Le Fresnoy, surnommé par certains le « Bauhaus de l’électronique » ou la « Villa Médicis high tech » et dirigé par Alain Fleischer, présente les œuvres réalisées par la vingtaine d’étudiants issus de cette formation en création numérique. Une exposition complétée par des œuvres d’artistes-professeurs invités du Fresnoy, et venus du monde entier. Confiée à José-Manuel Gonçalvès, directeur du CentQuatre-Paris, l’édition 2018 donne à voir vingt-six installations réunies sous la grande nef, et autant de films à visionner dans la salle de cinéma. Des œuvres (photographies, films, performances, installations immersives et sonores) inédites et surprenantes, parfois proches de l’utopie, où la science et les techniques sous-tendent l’art jusqu’à bousculer sa définition et nous questionner.

Première interrogation face à The Crystal & the Blind d’Hugo Deverchère (né en 1988 à Lyon) : un laboratoire rempli d’éprouvettes dans lequel se développent des micro-organismes végétaux et minéraux, notamment des bactéries (« inoffensives » précise l’artiste). Sommes-nous spectateur d’une œuvre ? Non, juste les témoins du processus de son apparition nous explique-t-on.
C’est la lumière, base de la photographie qu’Hideyuki Ishibashi (né en 1986 à Kobe) met en scène dans Macula, nous interrogeant sur ce qui se passe en photographie quand l’ombre prend le pouvoir sur la lumière.
La lumière est aussi au cœur du travail de Juan-Pablo Villegas qui explore avec son installation Umbra, la subjectivité liée à la lumière et les constructions mentales dans la perception des couleurs.
Pierre Pauze (né en 1990 à Meudon) interroge quant à lui la mémoire de l’eau à travers son installation Sonic Fluid. Et nous apprend que notre corps humain étant constitué à 90% d’eau, l’humanité est à ses yeux un data center de l’eau et de sa mémoire cachée. L’Installation-performance Mémoire d’un vol, de Vasil Tasevski (Né en 1984, en Macédoine) invite à se questionner sur le mouvement jusque dans sa trace.
Table musicale robotisée associée à une projection filmique, l’installation Neuromusic de Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin ouvre la possibilité de percevoir et d’agir sur le vivant à travers les ondes sonores.
Moins conceptuel, Saïd Afifi (né au Maroc en 1983) nous propose avec Yemaya un voyage poétique avec un casque dans la réalité virtuelle d’une grotte sous-marine.

Il est tout aussi difficile de résumer vingt-six films représentant plus de dix heures de projection. Trois ont particulièrement retenu notre intérêt. Omarska de Varun Sasindran (né en 1987 au Kerala) revient sur l’histoire du camp de concentration de Prijedor (Bosnie-Herzégovine) à partir de témoignages de survivants et d’une reconstitution du camp (aujourd’hui usine Arcelor Mittal) en animation 3D. Loin de nous éloigner de la réalité, cette forme filmique renforce notre émotion ressentie face aux images.
« Big Brother » se profile dans le Big Sister d’Annabelle Amoros (née en 1987 à Creil). Sous le soleil méditerranéen, on se promène librement dans une petite ville coquette et paisible. Tout semble idyllique à première vue. Quand soudain une voix sortie d’un haut-parleur rappelle à l’ordre un automobiliste mal garé, puis un maître qui n’a pas ramassé la crotte de son chien. Bienvenue dans la nouvelle société de la vidéo-surveillance ! On retrouve cette même crainte d’un monde sous contrôle permanent et pervers dans Swatted d’Ismaël Joffroy Chandoutis (né en 1988 en France). Mais dans ce film d’animation au décor de jeu vidéo dans lequel des joueurs en ligne se retrouvent victimes de cyber-harcèlement menaçant leur vie, la réalité et la fiction se mêlent jusqu’à nous égarer. Flippant.

Prévoir une bonne journée de visite au Fresnoy pour avoir le temps de voir l’ensemble de la production.

Catherine Rigollet

Visuels page expo : Hugo Deverchère, The Crystal & the Blind, 2018, installation. Ismaël Joffroy Chandoutis, Swatted, 2018, film d’animation (20 min). Varun Sasindran, Omarska, 2018, film (19 min). Vasil Tasevski, Mémoire d’un vol, installation, 2018.
Visuel vignette : Maia Flore, A rose is a rose is a rose, installation, 2018 (détail).
Photos : Courtesy Le Fresnoy.

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 22 septembre au 30 décembre 2018
Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains
22, rue du Fresnoy 59202 Tourcoing
Du mercredi au dimanche
De 14h à 19h
Tarif plein : 4€
Entrée libre le dimanche
www.lefresnoy.net