Conçue par Werner Spies et Julia Drost et présentée d’abord à
l’Albertina à Vienne, du 23 janvier au 5 mai 2013, la rétrospective Max Ernst s’est réinstallée à la Fondation Beyeler, du 26 mai au 8 septembre 2013 sous le commissariat de Raphaël Bouvier. Quelques 160 peintures, collages, dessins, sculptures et gravures se déploient dans une douzaine de salles.
On y retrouve un grand nombre de tableaux majeurs (Oedipus Rex, Katharina ondulata, Au premier mot limpide, La Vierge corrigeant l’enfant Jésus devant trois témoins : André Breton, Paul Eluard et le peintre, La ville entière, l’Habillement de l’épousée, etc.), des œuvres à énigmes, peuplées de créatures étranges, inquiétantes et érotiques, quand ce ne sont pas des arbres habités d’yeux et d’oiseaux squelettiques, des paysages tropicaux à la manière d’Henri Rousseau qu’il admirait, mais grouillant de plantes carnivores, ou des villes se dressant comme des ruines antiques sous des ciels verdâtres. Dans la belle et large sélection présentée à la Fondation Beyeler, on regretta toutefois le parti pris d’un parcours regroupant trop souvent les œuvres par techniques (collage, frottage, grattage, écriture automatique…) qu’Ernst, artiste assoiffé de liberté a le plus souvent mixées dans ses œuvres, ou qui l’ont accompagné tout au long de sa carrière, tel le collage.
Arrivé à Paris en 1922, interné à deux reprises comme « ennemi étranger », obligé de s’exiler aux États-Unis en 1941 avant de revenir en Europe dix ans plus tard, Max Ernst n’a cessé d’explorer des pistes nouvelles, inspiré par le souvenir autant que par la découverte, par l’actualité politique comme par les perspectives d’avenir visionnaires et prophétiques, et influencé par le dadaïsme né en réaction à la Première Guerre mondiale et qui était pour lui « une révolte, de la joie de vivre et de la colère, le résultat de l’absurdité, de l’immense saloperie de cette guerre épouvantable » et dont il trouva plus tard un second souffle dans le surréalisme.
Catherine Rigollet
Visuel : Max Ernst, La Ville entière, 1935/1936. Fondation Beyeler, 2013.