La peinture de Ronan Barrot est tout à la fois enflammée et romanesque. Enflammée par l’énergie et la spontanéité de la gestuelle puissante de l’artiste, sa façon de jeter tout son feu intérieur sur la toile, sa manière d’estomper les détails jusqu’à brouiller l’image, d’éclairer chaque scène d’une étrange et parfois inquiétante trouée de lumière, de se soumettre corps et âme à la peinture jusqu’à en oublier le sujet après l’avoir convoqué. Comme lorsqu’il peint jusqu’à 365 « crânes-paysages » (1995-2012), un motif inlassablement répété pour être à chaque fois modifié ; le peintre multipliant les couches de pâte colorée, triturant et enrichissant chaque vanité comme autant d’espaces d’une peinture vivante.
Romanesque aussi la peinture de Ronan Barrot par la dramaturgie qui se dégage des paysages comme des portraits, emportant le spectateur dans une histoire dont il peine à s’extraire après avoir tenté d’en saisir toutes les ambiguïtés.
Ainsi que fait cet enfant seul sur Le Pont, visage flouté à la manière d’un Bacon comme pour cacher sa peur. Est-il perdu, abandonné, où va-t-il ? On a beau se promener dans la toile, y revenir, le questionnement existentiel demeure. Né en 1973, Breton par sa mère et Provençal par son père, Ronan Barrot qui vit et travaille à Paris est un peintre à la fois contemporain dans la mesure où il peint tout ce qui l’entoure, s’imprégnant de nos existences, de notre environnement, et classique. S’inscrivant dans l’histoire de la peinture à l’instar d’Eugène Leroy ou de Paul Rebeyrolle, deux artistes contemporains que Ronan Barrot admire, il revendique ouvertement sa filiation avec Poussin, Manet, Rembrandt, Cézanne et tout particulièrement Courbet pour sa la façon de peindre : non pas le motif, mais dans le motif, s’efforçant, comme le maître d’Ornans, de redonner réalité, force, rythme et puissance au paysage vu. Et chez Ronan Barrot, tout est paysage, même les vanités.
Catherine Rigollet
– Représenté par la galerie Claude Bernard à Paris, exposant régulièrement en France et à l’étranger depuis 1999, Ronan Barrot, invité du festival d’Avignon 2017 dont il signe l’affiche rouge écarlate, y exposera aussi ses grandes toiles figuratives.
Visuel : Ronan Barrot, Le Pont, 2007. Huile sur toile, 210 x 130 cm. Collection privée – photo GCB/Jean-Louis Losi.
