Les impressionnistes et la mer

L’Impressionnisme n’est-il pas né au bord de la mer ? comme le suggère Impression soleil levant sur le port du Havre de Monet. À l’occasion de la célébration des 150 ans de la naissance de l’impressionnisme en 1874, et dans le cadre de la programmation du festival Normandie Impressionniste 2024, le musée des impressionnismes Giverny a choisi de montrer l’attirance des artistes impressionnistes pour la mer dans un joli parcours thématique riche de belles découvertes.

La mer. Il y a tant de motifs évoqués sur les toiles des impressionnistes. Mais pourquoi pas celui-là. L’Impressionnisme n’est-il pas né au bord de la mer ? comme le suggère Impression soleil levant sur le port du Havre de Monet. À l’occasion de la célébration des 150 ans de la naissance de l’impressionnisme en 1874, et dans le cadre de la programmation du festival Normandie Impressionniste 2024, Cyrille Sciama, directeur général du musée des impressionnismes à Giverny, a choisi de montrer l’attirance des artistes impressionnistes pour la mer dans un lumineux parcours en huit thèmes (Les Ports, Lumières, Falaises, Marée basse, Tempêtes et naufrages, Bretagne, Villégiatures La fuite), riche de belles découvertes, dont de nombreux Boudin et Monet, qui ne serait pas devenu le même peintre s’il n’avait pas croisé la route du célèbre artiste honfleurais.

Si les artistes impressionnistes se sont beaucoup focalisés sur la Normandie, séduits par les grandes plages de Deauville et de Cabourg, ils ont aussi illustré de nombreux sujets, de la vie des docks et des pêcheurs, au transport et à l’industrie maritime. Très présent dans l’exposition de Giverny, Boudin ouvre le bal des ports avec sa vue du bassin de Deauville, sa poissonnerie de Trouville, son Port de Camaret... Corot s’intéresse aux bateaux de pêche échoués dans le chenal à Trouville. Pissarro peint l’agitation du port du Havre avec les nouveaux bateaux à vapeur se mêlant aux voiliers. Il consacrera vingt toiles au port du Havre.
Autant que l’eau, la lumière attire les artistes qui se plaisent à peindre ses scintillements sur la mer (Monet, Falaises à Pourville, 1882), les soleils couchants (Daubigny, Coucher de soleil près de Villerville, vers 1876) et les ciels. Surnommé le « roi des ciels », Boudin en fit son motif de prédilection. Dans Coucher de soleil à marée basse (1884), ce ciel occupe encore les trois-quarts de la toile.
La section Falaises offre plusieurs œuvres moins connues de Monet, qui entre 1867 et 1897 n’a cessé de peindre la côte normande entre Sainte-Adresse (Le Havre) et Varengeville. C’est le cas de La Pointe du Petit Ailly (1897), une vue vertigineuse de falaise, presque abstraite, dans une touche pointilliste et des tons pastel de rose, jaune et vert. À marée basse, ses falaises se reflétant dans la mer, près de Fécamp, sont tout aussi spectaculaires par leur éclatant ton jaune-orangé (Marée basse aux Petites Dalles). Au premier plan, un affleurement de rochers couverts d’algues évoque déjà les Nymphéas à venir dans le bassin de Giverny.

Depuis Claude-Joseph Vernet à la fin du XVIIIe siècle, le thème du naufrage et des tempêtes a pris un essor considérable. Il n’est que de visiter le nouveau parcours du musée de la Marine à Paris, pour le vérifier. La génération suivante a suivi, Courbet en tête avec ses représentations de mer déchainée comme cette Vague (1870) qui s’apprête à déferler sur une barque tirée sur la grève ou encore cette autre Vague (vers 1871-1873) particulièrement impressionnante sur un fond orange et rouge inquiétant. Et Boudin encore avec Un grain (1886), décrivant deux voiliers secoués sur fond de ciel ténébreux.
Gauguin qui a déménagé en Bretagne pour faire évoluer sa peinture en s’intéressant davantage aux lignes et aux formes (Sur la plage de Bretagne, 1889), mais aussi Monet, Moret, Guillaumin et Maufra sont séduits par ses côtes rocheuses, ses falaises et ses tempêtes (Maufra, La Tempête à Quiberon, 1900).

Le début du tourisme balnéaire avec ses baignades, ses crinolines sur la plage et ses promeneurs vont offrir une nouvelle source de motifs aux impressionnistes, comme Manet, Degas, Monet et Boudin qui va s’en donner à cœur joie dans d’innombrables aquarelles et tableaux (La Plage de Trouville, 1865). Le parcours se referme sur la thématique de la Fuite en mer, symbolisant le goût naissant du voyage et de l’exotisme, comme celui de Gauguin quittant tout pour Tahiti.

Catherine Rigollet

Archives expo en France

Infos pratiques

Du 29 mars au 30 juin 2024
Musée des Impressionnismes
Giverny (27)
Tous les jours (y compris les jours fériés), de 10h à 18h
Tarifs : 12 € | 9 €
https://www.mdig.fr


 Édité par les éditions Flammarion, le catalogue de l’exposition reconstitue cette belle promenade le long des côtes en compagnie de Boudin, Courbet, Monet, Maufra, Degas, Guillaumin…donnant une nouvelle vision de l’attirance des artistes impressionnistes pour la mer et la vie côtière. 160 pages, 35€. Parution 10 avril 2024.


Visuels :

 Eugène Boudin, Deauville, le bassin, 1884. Huile sur panneau, 46,5 x 38 cm. Giverny, musée des impressionnismes.

 Camille Corot, Trouville, bateaux de pêche échoués dans le chenal, 1875. Huile sur papier, marouflé sur toile, 21 x 23,5 cm. Paris, musée d’Orsay.

 Claude Monet, Marée basse aux Petites Dalles, 1884. Huile sur toile, 60 x 73 cm. Hasso Plattner Collection.

 Claude Monet, Sainte-Adresse, 1867. Huile sur toile, 57 x 80 cm. Washington, National Gallery of art.

 Gustave Courbet, La Vague, 1870. Huile sur toile, 88,4 x 107,2 cm. Orléans, musée des beaux-arts.

 Eugène Boudin, La Plage de Trouville, 1867. Huile sur bois, 31 x 48 cm. Musée d’Orsay.

 Paul Gauguin, Sur la plage de Bretagne (Pouldu, ndlr), 1889. Huile sur toile, 60 x 73 cm. Oslo, Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design.

Photos : L’Agora des Arts, 28 mars 2024