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André Fougeron (1913-1998). « Voilà qui fait problème vrai »

André Fougeron, peinture militante

Une nature morte à la lampe de mineur et au journal L’Humanité, ce n’est pas commun ! Cette Composition aux objets familiers, issue d’une collection particulière et présentée dans la série Le Pays des mines, est une des pièces rares de l’exposition rétrospective que La Piscine de Roubaix consacre à André Fougeron (1913-1998). Ce peintre qui fut célèbre, notamment à l’heure du PCF triomphant (Fougeron y adhéra de 1938 à sa mort), reste pourtant largement méconnu en France. Il faut dire que Fougeron, adepte d’un art engagé et tenant d’une figuration qui frôle parfois l’allégorie pesante (voir un de ses plus célèbres tableaux, Civilisation atlantique de 1953, aujourd’hui conservé à la Tate Modern et qui ne fait pas partie de l’exposition roubaisienne), n’a pas toujours soulevé l’enthousiasme de la critique ni des amateurs éclairés en quête de nouvelles esthétiques. « Le problème essentiel en art est celui de l’affrontement avec la réalité sociale. », « Les prémices d’un réalisme nouveau sont à extraire de la richesse des sentiments du peuple considéré comme principale source d’inspiration, de sujet. » : avec de telles sentences, Fougeron ne s’est pas fait que des alliés...

Il serait bien évidemment dommage de s’en arrêter là car l’œuvre de Fougeron a sa place dans notre histoire de l’art et l’exposition de La Piscine, qui regroupe 170 œuvres (toiles, dessins, aquarelles, gouaches, affiches), vient nous rappeler la diversité de la palette, des recherches et des thèmes abordés par cet autodidacte qui ne connut de formation que celle d’apprenti dessinateur en dentelles et tissus, même s’il suivit aussi des cours du soir de dessin dispensés par la ville de Paris. Si certaines séries comme les rugbymen, les vendanges en Touraine ou les paysages de Beauce ne figurent pas dans cette rétrospective, les neuf salles accueillent neuf séries représentatives de l’art de Fougeron, de la salle 1 intitulée L’art cruel inspirée de la guerre d’Espagne, de l’Occupation et de la Libération à un hommage tardif à Courbet (salle 9). De l’expressionnisme au pop art en passant par le surréalisme, Picasso, Matisse ou Pignon (dont on remarque la proximité dans les toiles de Fougeron de 1946), le peintre a frotté son esthétique à de nombreuses influences au long de sa carrière d’une soixantaine d’années, ce qui montre qu’il n’est pas resté figé dans le style dogmatique ou « réaliste socialiste » que l’on a pu lui reprocher.

Certes, il fait sans doute figure du principal représentant d’une peinture militante (série Le pays des mines) et engagée ( Triptyque de la honte sur la guerre d’Algérie) et d’un nouveau réalisme français (Les Parisiennes au marché ou Paysanne tourangelle). Mais, du côté des séries Intimité ou Les femmes d’Italie, on découvre un tout autre Fougeron. C’est la grande qualité de cette exposition de nous montrer cet éclectisme, néanmoins toujours attaché à « cette fidélité entretenue au dessin comme fondement de toute expression artistique », comme le précise Bruno Gaudichon, commissaire de l’exposition, dans le très complet catalogue (éd. Gourcuff-Gradenigo, 34€) qui accompagne l’exposition.

Jean-Michel Masqué

Visuel : André Fougeron, Les parisiennes au marché, 1947-48, huile sur toile, 130 x 195 cm. Musée d’Art Moderne de Saint-Étienne Métropole. Photo : Y. Bresson. © ADAGP Paris 2014.

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Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 15 février au 18 mai 2014
La Piscine
Musée d’art et d’industrie André Diligent
23, rue de l’Espérance, Roubaix (Nord)
Du mardi au jeudi de 11h à 18h
Le vendredi de 11h à 20h
Samedi et dimanche de 13h à 18h
Plein tarif : 9€
Tél. 03 20 69 23 60
www.roubaix-lapiscine.com