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Ceci n’est pas un portrait. Figures de Fantaisie de Murillo, Fragonard, Tiepolo…

Un titre qui sent son Magritte ! Au fil des 80 portraits de l’exposition, on finit par comprendre l’argumentation de la commissaire, Melissa Perceval, spécialiste de la figure de fantaisie chez Fragonard, représenté ici par le Cavalier assis près d’une fontaine, c. 1769. Car les représentations de personnages qu’elle a choisies se démarquent des portraits académiques de modèles identifiés, dont la pose, le décor, les vêtements et le regard neutre plaident pour leur statut socio-culturel et politique.

Les figures de fantaisie, au contraire, se distinguent par l’instantanéité de leur pose ou de leur regard, instant décisif pictural que l’on ne croyait possible qu’en photographie et par l’immédiateté de leurs sentiments ou émotions. Personnages de la rue plutôt que de la cour, ils se caractérisent par un décor minimaliste, par un gros plan sur la moitié supérieure du corps, par des jeux de regard qui ferrent le spectateur et le rendent complice, que ce soit le Jeune Mendiant de John Opie à qui l’on glisserait une pièce, le Joueur de Théorbe d’Antiveduto Gramatica devant lequel on ne peut s’empêcher de tendre l’oreille ou encore ce beau Portrait d’une femme inconnue ou la Menaceuse aux attraits dévoilés de Hyacinthe Rigaud, qui nous rendrait presque un peu penauds.

Ailleurs, les figures, peu soucieuses d’être regardées, se concentrent sur leur monde intérieur (« l’absorbement », cher à l’historien et critique d’art Michael Fried), ou se livrent à des éclats de rire ou des regards séducteurs destinés à des comparses hors champ.
Les figures d’artistes des 16e, 17e et 18e siècles, ont été accrochés en sept volets thématiques voire typologiques, sans souci de chronologie : Jeux de regards ; Musiciens ; Vies intérieures ; Dormeurs ; Rires et sarcasmes ; Laboratoire du visage (études d’atelier sur la « matière » et la carnation des visages, rides, plis, etc.) ; Atelier du costume (personnages inclassables malgré leur costume). Elles franchissent allègrement les frontières des pays ou des styles, que ce soit le style « tronies » à la Rembrandt, les vieillards de la peinture nordique, les fêtards italiens. On y retrouve quelques peintres fameux – Longhi, Murillo, Strozzi, Greuze, pour n’en citer que quelques uns – et beaucoup de peintres peu connus ou inconnus, qui, dans cette forme de peinture intuitive et spontanée, seront de belles découvertes.

Elisabeth Hopkins

 Catalogue 288 pages, 150 illustrations, 21 x 24 cm, Ed. Somogy, 2015 - 35€.

Visuels : Moreelse, Johannes (Utrecht vers 1602 - Utrecht 1634), Démocrite, vers 1630. Utrecht ; Centraal Museum © Collection Centraal Museum, Utrecht.
Sweerts Michael (1618-1664), Garçon au turban tenant un bouquet de fleurs. Vers 1658. Collection Thyssen-Bornemisza. ©Museo Thyssen-Bornemisza. Madrid.
Giovanni Battista Piazzetta (Venise 1682- Venise 1754), Jeune Paysanne endormie. Salzburg, Residenzgalerie. Fotostudio Ulrich Ghezzi, Oberalm

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 21 novembre 2015 au 6 mars 2016
Musée des Augustins, Musée des Beaux-Arts de Toulouse
21, rue de Metz - 31000 Toulouse
Ouvert tous les jours, de 10h à 18h, sauf le mardi
Nocturne jusqu’à 21h le mercredi.
Plein tarif : 8€
www.augustins.org