Vous consultez une archive !

Gaston Chaissac, poète rustique et peintre brut

Un an avant le centenaire de sa naissance, le musée de Grenoble célèbre Gaston Chaissac avec une magnifique exposition qui réunit plus de 200 œuvres dans un parcours rétrospectif allant des premiers dessins de 1936 jusqu’aux grands collages de papiers peints et les derniers Totems de 1964. Dessinateur, peintre et sculpteur, Chaissac a créé plus de 5000 pièces en vingt ans d’une courte carrière stoppée à 54 ans lorsqu’il meurt d’épuisement et de découragement, au moment même où sa cote commence à monter. Longtemps tenu pour marginal dans le contexte de l’art français d’après-guerre, Chaissac est un indomptable qui ne cesse d’inventer des formes et des techniques nouvelles, explorant formes et figures, passant de la figuration à l’abstraction, les hybridant sans complexe. Son œuvre singulière constituée de curieux personnages stylisés, de grands totems colorés, d’encres zoomorphes, d’objets détournés…n’a pas échappée à Jean Dubuffet qui le classe d’emblée parmi les artistes de l’art brut. Refusant d’être ainsi catalogué, Chaissac qui fut proche du groupe Cobra, se décrit comme un peintre naïf faisant des dessins d’enfants, mais il souligne aussi qu’il veut pousser à un très haut degré de raffinement ses dessins abstraits à la plume. Car cet autodidacte en art, « poète rustique et peintre moderne » comme l’appelle Guy Tossato (commissaire de l’exposition et directeur du musée de Grenoble) est aussi un penseur et un homme de lettre(s). Ce grand épistolier écrit deux à trois lettres chaque jour, « un besoin impérieux » témoigne sa fille Annie Chaissac expliquant que son père écrivait le matin et peignait l’après-midi. Il écrit aussi des poèmes plein d’humour et de révolte, souvent proches du dadaïsme comme certains de ses dessins. Défendu par Breton, Bloc, Paulhan et le milieu culturel parisien, il est publié par la NRF et collabore à des petites revues poétiques ou militantes. Grand lecteur et observateur de la création artistique, il connaît le travail de Miro, Kandinsky, Doisneau qui vient le photographier, il admire Matisse et rêve de rencontrer Picasso, il est soutenu par Gleizes et Otto Freundlich. Mais tenaillé par une mélancolie incurable, se sentant non reconnu à sa juste valeur, Chaissac reclus dans son bocage vendéen meurt en 1964. Cette exposition, riche de nombreuses œuvres inédites issues de la collection privée de la famille Chaissac, de prêts de collectionneurs privés et publics notamment le musée des Sables-d’Olonne, nous plonge avec passion dans l’univers de ce grand artiste inclassable.

Catherine Rigollet

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 31 octobre au 31 janvier 2010
Musée de Grenoble
5, Place Lavalette - 38000
Tél. 04 76 63 44 11
Le musée est ouvert tous les jours sauf le mardi, de 10h à 18h30
www.museedegrenoble.fr

 A lire : Le catalogue coédité par Actes Sud et le musée de Grenoble. 315 pages, superbement illustrées. 42€