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L’Impressionnisme dans l’art canadien

Voici un monde pictural que l’on prend plaisir à découvrir ! Une centaine d’œuvres d’une bonne trentaine de peintres canadiens, inconnus de ce côté-ci de l’océan, exposées ici au musée de Lausanne, après le Kunsthaus de Munich et avant le Musée Fabre de Montpellier (du 13 juin au 24 septembre 2020).
Ces peintres viennent à Paris dans les années 1880, alors que l’audace impressionniste continue à s’afficher sur les cimaises. L’exposition s’articule autour de leur appropriation des lieux et des thèmes impressionnistes jusqu’à leur retour au Canada où, confrontés à leurs espaces immenses et à la rudesse de leur climat, ils donnent le meilleur d’eux-mêmes, offrant mieux même qu’en France, jeux de lumière et scènes de neige leur permettant toutes les gammes impressionnistes. Ceci, jusqu’à l’émergence du Club des Sept à Toronto et du Groupe de Beaver Hall à Montréal en 1920 qui paveront la voie canadienne du postimpressionnisme.

À leurs tout débuts en France, les peintres empruntent les tonalités plus sombres de l’Ecole de Barbizon, tel William Blair Bruce, qui s’installera plus tard à Giverny et se rapprochera des couleurs pures et des touches fragmentées impressionnistes (Paysage avec coquelicots, 1887). De son côté, James Wilson Morrice, 1865-1924, joue avec les variations de lumière et l’instant éphémère (La régate, c. 1902-07) ou, au contraire, fige ses scènes (Jour de lessive à Charenton, 1899). La touche expressive, les couleurs lumineuses et les figures un peu floutées caractéristiques de l’impressionnisme français, rendent bien les scènes de bord de l’eau, les arbres, les personnages des peintres d’outre-Atlantique. Ernest Lawson voit Un canal en hiver, c. 1894, avec une naïveté picturale qui transformerait presque les glaçons en cygnes, et les touffes d’herbes de la rive en mini-bateaux. Clarence Gagnon lui, travaille en bord de mer, animant ses eaux et ses ciels de personnages en mouvement (Brise d’été à Dinard, 1907).
Les Canadiens s’amusent à observer les labeurs et les loisirs français, que ce soient Les Lavandières bretonnes, 1991 de Maurice Cullen ou Le pique-nique, 1904-05 d’Henri Beau. Et n’oublions pas les portraits de femmes ou d’enfants, chers à Renoir, tradition dans laquelle s’engouffre joyeusement Laura Muntz, avec À la fenêtre, 1898, où deux jeunes enfants, lovés l’un contre l’autre, lisent un livre devant une fenêtre dévoilant, fort loin, une ligne d’horizon industrialisée. Paul Peel, qui ne vécut qu’une trentaine d’années, peint une Femme au Jardin, 1889, que n’aurait pas désavouée Berthe Morisot.
Les peintres finissent par retourner au Canada, et leurs scènes de neige (omniprésente) et d’activités bien canadiennes, soit dans l’ immensité des campagnes soit dans les villes, occupent maintenant leurs toiles. Le blanc leur permet toutes les variations de tonalités, que s’y reflète le ciel (Le train en hiver, c. 1913-14 de Maurice Gagnon) ou la lumière des réverbères (Soirée d’hiver rue Craig, Montreal, 1912 de Maurice Cullen).
Après la guerre de 14-18, où le Canada a envoyé quelque 600 000 hommes, les artistes useront de nouveaux idiomes pour explorer leur géographie jusqu’à la Côte Ouest, et l’urbanisation en pleine mutation. Le modernisme canadien est en marche.

Elisabeth Hopkins

Visuels : William Blair Bruce - Hamilton (Ontario) 1859 – Visby (Suède) 1906. Paysage avec coquelicots (Landscape with Poppies), 1887, huile sur toile. Musée des beaux-arts de l’Ontario, Toronto.
Maurice Cullen - Saint-Jean de Terre-Neuve (Terre-Neuve-et-Labrador) 1866 – Chambly (Québec) 1934. La récolte de la glace (The Ice Harvest) , vers 1913, huile sur toile. Musée des beaux-arts du Canada.

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 24 janvier au 24 mai 2020
Fondation de l’Hermitage
Route du Signal 2
1018 Lausanne, Suisse
Ouvert du mardi au dimanche, 10h à 18h
Nocturne le jeudi, 10h à 21h
Fermé le lundi.
Entrée : CHF 22
www.fondation-hermitage.ch


Catalogue : Le Canada et l’Impressionnisme : Nouveaux horizons, 1880-1930, avec prologue d’Alan Gopnik. Publié par le Musée des beaux-arts du Canada, 5 Continents Editions, Milan. 296 pages, 24 x 29 cm, 180 illustrations couleur, CHF 52.-