« Matisse a toujours refusé que Valtat expose à ses côtés pour ne pas montrer à la critique qu’il fut un fauve avant les fauves ». Si l’on reste dubitatif devant cette explication de Maïthé Vallès-Bled, la passionnée commissaire de l’exposition présentée à Sète, il n’en demeure pas moins qu’entre 1895 et 1905, Louis Valtat (1869-1952) va élaborer en solitaire une œuvre qui le situe comme un précurseur du fauvisme ; mouvement qui ne sera identifié et « catalogué » qu’en 1905, lors du Salon d’Automne. Après avoir étudié à l’Académie Julian avec Pierre Bonnard et Maurice Denis, Valtat se laisse influencer par Vincent van Gogh et Paul Gauguin. Dès 1895, il commence à apposer des couleurs vives, comme dans Les Ecaillères d’huîtres (1895-96), inspiré d’une scène de la vie quotidienne dans le bassin d’Arcachon. Puis il découvre les paysages du Midi et la lumière du Sud qui exalte les contrastes. Il peint Le Rastel d’Agay (1898), le Paysage méditerranéen (1902), les Roches rouges de l’Estérel (1902) ou encore Les Rochers rouges à Anthéor (1902-1903), des tableaux dans lesquelles le dessin s’efface et où s’affirment la couleur pure, les formes simplifiées, les cadrages originaux sur une anecdote qui devient sujet principal. Toutefois, les influences du pointillisme sourdent parfois dans la division des touches. C’est bien là la complexité de Valtat qui, tout en se tenant éloigné de la scène parisienne, des Nabis, de l’Expressionnisme, ou des influences néo-impressionnistes, va faire cohabiter les styles dans son œuvre, se cherchant tout au long de sa vie. « Patience, un jour l’on s’apercevra que Valtat est un grand peintre », déclare la marchand Ambroise Vollard auquel Valtat confie dès 1900 la totalité de sa production et qui lui organise une exposition personnelle en 1904. Las, à partir de 1905-1906, Valtat s’éloigne du fauvisme et de l’avant-garde. Son fils né en 1908 devient son modèle favori. Il s’intéresse un peu à la sculpture en fréquentant Maillol, s’essaie à l’abstraction, puis se réoriente vers une touche plus impressionniste, peint des natures mortes insignifiantes. Les couleurs ne vibrent plus, l’émotion s’est enfuie….Une raison qui a poussé Maïthé Vallès-Bled à se concentrer sur les années 1895 à 1910, au travers de 70 œuvres provenant pour l’essentiel de deux grandes collections privées internationales.
Catherine Rigollet
À lire : Le catalogue d’exposition. 250 pages, 60 illustrations. Collection Beaux-Arts. 38€
– Le musée de Lodève consacre une autre exposition à Louis Valtat, du 2 juin au 16 octobre 2011. www.lodevoisetlarzac.fr