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Sofonisba Anguissola et Lavinia Fontana. A Tale of Two Women Painters

Toutes deux sont italiennes, peintres et appréciées notamment comme portraitistes. Deux femmes exceptionnelles car peu d’artistes féminines ont pu mener une véritable carrière à la Renaissance.

Issue d’une famille aristocratique, Sofonisba Anguissola (Crémone 1535 – Palerme 1625) n’est pas née dans une famille de peintres. Mais soutenue dès son adolescence par son père pour qui l’initiation artistique de ses (six) filles fait partie intégrante de leur éducation, elle se révèle très vite une talentueuse dessinatrice et une portraitiste délicate, rodée par une très grande pratique de l’autoportrait (Autoportrait, 1556) et des portraits de sa propre famille. Elle excelle dans les miniatures, un mode d’expression dans lequel les femmes sont alors souvent réduites. Il n’empêche, remarquée et encouragée par Michel Ange, accompagnée par son père qui gère sa carrière (conformément à la bienséance sociale de l’époque qui veut qu’aucune aristocrate ne travaille, elle ne reçoit personnellement aucune commande), sa réputation l’a déjà précédée en Espagne où appelée par Philippe II à Madrid, elle devient peintre à la cour et confidente d’Isabelle de Valois. Le réalisme et le raffinement de ses portraits lui assurent succès et célébrité (portrait de Giovani Battista Caselli, poeta de Cremona, 1557-58). Rentrée en Italie en 1573, elle servira de modèle de réussite féminine artistique à de nombreuses femmes. On découvre en fin de parcours de l’exposition son portrait par Van Dick qui l’a peinte en 1624 ; elle a alors 89 ans et ne peut plus peindre à cause d’une cécité.

À la différence de Sofonisba Anguissola, Lavinia Fontana (Bologne 1552- Rome 1614) est fille de peintre. Formée dans l’atelier de son père, le maniériste Prospero Fontana, elle s’affirme très vite comme une portraitiste de talent, dans la lignée d’Anguissola et est considérée comme une des premières femmes à faire de la peinture un métier à part entière au même titre que ses collègues masculins. Installée à Rome, ayant même intégré son propre époux, l’artiste Gian Paolo Zappi, parmi les assistants de son atelier, elle obtient de nombreuses commandes de tableaux religieux pour les églises et les oratoires privés (Virgin of silence, 1589), et se lance aussi dans des compositions mythologiques (Judith and Holofernes, 1595). Première femme admise au sein de la prestigieuse Accademia di San Luca, elle est aussi célèbre hors des frontières de l’Italie, comme en témoigne son portrait de la famille royale d’Espagne commandé par Philippe II. Elle sera surtout l’une des premières femmes à représenter des femmes nues comme Mars and Venus, 1595 et surtout Nude Minerva, 1604-5 (une autre version de Minerve s’habillant sera peinte en 1613). Rappelons qu’en tant que femme, elle n’a pas le droit d’étudier l’anatomie et de dessiner des personnages d’après nature. Une œuvre qui rompt avec l’image d’une peinture dite « féminine » au XVIe siècle et que souligne le musée du Prado à Madrid en ouvrant avec la sublime Minerve nue de Fontana, le bel hommage qu’il rend à ses deux femmes peintres d’avant-garde réunies dans une grande exposition divisée en huit sections, des autoportraits aux œuvres religieuses, en passant par les portraits de famille, scènes mythologiques et natures mortes.
Si d’autres femmes artistes, telle Artemisia Gentileschi (1593-v.1652) * vont leur emboiter le pas à La Renaissance et tenter de se faire une place et d’inscrire leur nom dans l’histoire de l’art , les obstacles sont encore et resteront nombreux, longtemps.

Catherine Rigollet

*(Lucrèce, tableau d’Artemisia Gentileschi qui met en scène l’honneur outragé d’une femme, a été adjugé près de 4,8 millions d’euros, un record pour l’artiste, mercredi 13 novembre 2019 chez Artcurial),

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 22 octobre 2019 au 2 février 2020
Musée du Prado
Du lundi au samedi, de 10h à 20h
Dimanche et fêtes, de 10h à 19h
Tarif plein : 15 €
www.museodelprado.es


Visuels : Sofonisba Anguissola, « Self-Portrait at the Easel ». Oil on canvas. c. 1556−57. Poland, The Castle -Museum in Łańcut.
Lavinia Fontana, « Nude Minerva », c.1604-5. Oil on canvas. Bolonia, Collezione Pavirani.