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Anna-Eva Bergman. L’Atelier d’Antibes (1973-1987)

Femme du peintre Hans Hartung avec lequel elle vivra une relation passionnée et un peu tumultueuse, Anna-Eva Bergman (1909-1987) est restée relativement méconnue malgré de très nombreuses expositions, notamment à la galerie de France, qui l’expose dès 1962 et lui offre une première et belle rétrospective en 1977, ou encore récemment la galerie Jérôme Poggi en 2014. Le Domaine de Kerguéhennec (Morbihan), en collaboration avec la Fondation Hartung-Bergman, met à l’honneur cette artiste née à Stockholm, grande dessinatrice et talentueuse illustratrice qui s’est tournée à partir du début des années 1950 vers « un art d’abstrait, non figuratif ».

Intéressée par ce fameux « nombre d’or », cette « divine proportion », elle est à la recherche d’un nombre restreint de formes simples pour représenter des paysages minimalistes mais d’une grande complexité. Des paysages issus de sa mémoire et de sa Norvège natale qui continuera de l’inspirer jusqu’à Antibes, où elle installe son dernier atelier en 1973, avec Hartung qu’elle a épousé une seconde fois en 1957 (après avoir divorcée de lui en 1938).

Pour Olivier Delavalade, directeur du Domaine de Kerguéhennec qui abrite aussi une collection d’œuvres de Tal Coat, « Plus que de paysage, pour ces deux artistes, il faudrait parler du monde, ou du réel, ou du vivant encore, pour reprendre un terme cher à Tal Coat ».

En osmose avec l’univers qui l’entoure, mais sans rupture avec les ambiances du Grand Nord et sans succomber à la couleur du Sud, Bergman peint la lumière, l’obscurité, les montagnes, la pluie, les vagues, le vent. Silencieuse, mentale, chargée de spiritualité, la peinture de Bergman se contemple. Pour autant, il faut bouger devant ses toiles, de la plus petite (quelques centimètres) aux plus grandes (2m x 3m) parce que ses peintures réalisées à l’acrylique sur des toiles qu’elle recouvre au préalable de feuille de métal sont vivantes, mouvantes, rayonnantes. Leur perception n’est jamais la même selon la lumière et notre propre position. « Je veux dessiner le mouvement –le mouvement lui-même et son rythme. Je veux créer la vie », écrit-elle. Alors elle peint le mistral soufflant sur les vagues avec de larges motifs circulaires (Vague Baroque, 1973), les impacts de pluie sur le sol desséché de l’été avec une giboulée de gouttes d’or (Pluie, 1974). Les formes se font de plus en plus simples et la gamme colorée plus restreinte. Une dominante de noir et de bleu sombre pour les falaises, du blanc pour les lacs, les fjords et les terres enneigées.

Elle ajoute à son vocabulaire de formes d’autres thèmes : pierres, astres, tombeaux et barques soulignant un sens dramatique de l’existence, et la ligne. « Existe-t-il quelque chose de plus beau qu’une ligne pure et sensible ? » (Montagne en une ligne, 1978). Un travail sur l’épure qui la mènera au thème ultime de l’horizon, ce « par-delà du connu » qu’elle ne cessera plus de cerner, multipliant les œuvres sur ce thème jusqu’à son dernier tableau, une œuvre en deux parties constituée d’une étendue blanche griffée de lignes, surmontée d’un monochrome d’un bleu-noir d’une profondeur abyssale.

L’exposition présentée au Domaine de Kerguéhennec (Morbihan) s’est concentrée sur les Années d’Antibes (1973-1987), l’œuvre ultime de Bergman, la plus resserrée, la plus radicalisée.
N’hésitez pas à faire la route, de belles surprises sont au bout du chemin.

Catherine Rigollet

 


 Outre l’exposition Anna-Eva Bergman qui se déploie dans le château et les écuries, le Domaine abrite aussi le Fonds Tal Coat (1905-1985) dont l’accrochage vient d’être renouvelé et un vaste parc de sculptures avec des œuvres de Etienne Hajdu, Vincent Barré, Markus Raetz, Bauduin, Simon Augade, François Feutrie, François Morellet, Giuseppe Penone, Marta Pan, etc.

visuels : Anna-Eva Bergman, N°49-1973 Vague baroque, 1973, Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile, 97 x 130 cm © Fondation Hartung-Bergman / Adagp, Paris 2016.
Anna-Eva Bergman, N° 19-1975 Eau III, 1975, acrylique et feuille de métal, papier marouflé sur toile, 64,2 cm x 49,2 cm © Fondation Hartung-Bergman / Adagp, Paris 2016.
Château de Kerguéhennec. Avec Ana 2.108.1210.F.D.D, 2001 - Acier métallisé, peinture polyuréthane. Oeuvre de Jean-Gabriel Coignet (né en 1951) Photo L’Agora des Arts.

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 5 mars au 4 juin 2017
Domaine de Kerguéhennec
[Château, écuries]
56 500 Bignan (au nord de Vannes)
Du mercredi au samedi, 14h-18h
Le dimanche, 11h-13h et 14h-18h
Entrée libre et gratuite
Parc de sculptures : tous les jours, 8h-21h
Tél. 02 97 60 31 84
www.kerguehennec.fr

 

 Une exposition consacrée à Pierre Tal Coat sera également présentée cet été au Centre d’Arts Plastiques de Royan. www.cap-royan.com/pierre-tal-coat