Après la riche monographie de Mapplethorpe au Grand Palais ( Robert Mapplethorpe, jusqu’au 13 juillet 2014 ) et ses 250 photographies à l’esthétisme construit, glacé et perfectionniste, ne manquez pas le Musée Rodin. Robert Mapplethorpe (1946-89) faisait de la photographie sculpturale, inspiré par la scène gay new-yorkaise des années 70 et 80. Une centaine de ses photos dialoguent avec environ 50 sculptures de Rodin (1840-1917). Le rapprochement, que l’on voudrait croire facile, est servi par une scénographie efficace jouant sur les noirs et blancs. Construit sur les similarités entre les œuvres (plutôt que sur l’opposition, basique, entre les deux media), il offre des perspectives nouvelles en jouant sur leur exploration de certains thèmes : le corps nu, ébauché et en mouvement chez Rodin, posé/pausé pour Mapplethorpe ; le sexe, masculin et objet d’art chez le photographe, féminin et offert comme une fleur chez Rodin ; le contraste noir/blanc des peaux en deux dimensions du photographe se retrouvant dans le passage du plâtre au bronze chez le sculpteur, et, enfin, l’utilisation de petits vases, dont les deux artistes étaient collectionneurs, symboles d’une recherche esthétique chez Mapplethorpe, opportunité pour des œuvres intimistes pour Rodin. Un vainqueur dans cette confrontation visuelle moins provocante qu’on ne le penserait ? Ni l’un, ni l’autre. Car leurs œuvres se parent ici, de par leur proximité et avec succès, d’une autre lumière, d’une autre dramaturgie, d’une autre dynamique.
Elisabeth Hopkins
Visuel page expo : Robert Mapplethorpe, Robert Sherman, 1983 (MAP 1236 © 2014 Robert Mapplethorpe Foundation, Inc. All rights reserved.) / Auguste Rodin, Tête de la Luxure, 1907, plâtre. (Musée Rodin, Paris – Photo C. Baraja)